Les œuvres de A. Serhane sont dominées par l'expérience de l'ironie, non pas de cette ironie
qui cherche à ridiculiser son interlocuteur, mais d'une ironie que j'appellerais fondamentale. Depuis
son premier roman, l'ironie s'est éloignée de tout verbiage rhétorique, pour s'imposer comme vision du
monde, une manière de révéler les failles de la société. Un signe on ne peut plus de lucidité. Dans Les
Temps noirs, l'ironie prend pour cible les archaïsmes de la société marocaine en la faisant parler contre
elle-même, en lui renvoyant ses propres stéréotypes. Le ton provocateur, l'exagération, l'outrance,
l'absurde qui fondent la situation, l'humour de la langue triviale et imagée, les déformations
linguistiques, phonologiques et le travail sur les clichés démarquent le livre.
Dans une narration fluide se défilent des histoires, des traces et des personnages dépouillés à
l'extrême pour mieux leur extraire ce qu'ils ont d'essentiel. Tout laisse apparaître ce désir de l'écrivain
de mettre à nu ce qui constitue l'essence d'une société qui se dissimule derrière ses masques. Les
esprits revisités, les trajectoires mises en scène subissent les assauts du narrateur principal. C'est cette
ironie qui constitue le propre de ce travail.

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